Depuis plusieurs années en Rd Congo, on assiste au non-respect du délai légal et constitutionnel pour le dépôt du projet de loi de Finances à l’Assemblée nationale par le Gouvernement de la République. Comme qui dirait, le Parlement et le Gouvernement ont pris l’habitude de la liberté de violer systématiquement la Constitution et les lois de la République. Ce qui est une entorse au fonctionnement normal de l’Etat, estime-t-on. Et pourtant, lors de son conseil des ministres du 27 septembre 2019, le Gouvernement avait dit avoir pris toutes les dispositions pour que le dépôt du projet de loi de finances soit effectué au Parlement dans le délai. Mais qu’est-ce qui cloche ? Est-ce la nécessité d’enregistrer les prévisions des partenaires bi et multilatéraux, ou la volonté du Gouvernement de revoir à la hausse l’enveloppe de 7 milliards de dollars Us, considérée comme dérisoire ?
Au cours de la dernière législature, les députés nationaux, voire l’ex-Speaker de la Chambre basse du Parlement, Aubin Minaku Ndjalandjoko, dénonçaient cette attitude de différents gouvernements dans la pratique, depuis quelques années, de déposer en retard, et la loi sur la réédition des comptes, et le projet de loi de finances. Ce qui viole la loi relative aux Finances publiques en son article 83 et l’article 126 de la Constitution.
En son article 83 la loi des Finances stipule que : « le projet de loi des Finances de l’année est déposé par le Gouvernement au Bureau de l’Assemblée nationale au plus tard le 15 septembre de chaque année… Toutefois, si le projet de loi de Finances, déposé dans les délais constitutionnels, n’est voté avant l’ouverture du nouvel exercice, il est mis en vigueur par le Président de la République… Si le projet de loi de Finances n’a pas été déposé en temps utile pour être promulgué avant le début de l’exercice, le Gouvernement demande à l’Assemblée nationale et au Sénat l’ouverture de crédits provisoires. Si quinze jours avant la fin de la session budgétaire, le Gouvernement n’a pas déposé son projet de budget, il est réputé démissionnaire ».
De ce fait, l’Assemblée nationale dispose de 40 jours à compter de la date de dépôt, pour adopter la loi de Finances de l’année. Si ce délai constitutionnel est respecté, et que le texte est transmis au Sénat pour être adopté dans les 20 jours. Et l’article 78 de cette même loi relative aux finances publiques stipule que la loi sur la reddition des comptes doit-être déposée préalablement aux deux Chambres du Parlement avant le vote du projet de loi de Finances.
Etant constitutionnellement budgétaire, la session ordinaire de septembre 2019 en cours est consacrée à l’examen et au vote du projet de loi de finances de l’exercice 2020. Et avant l’examen de cette loi, il faudra d’abord adopter le projet de loi portant reddition des comptes de la Loi de finances de l’exercice 2018, qui est un préalable au vote de la loi de finances 2020.
Aujourd’hui nous sommes déjà à plus de 20 jours de l’ouverture, depuis le 15 septembre dernier, de la session ordinaire de septembre 2019, essentiellement budgétaire, mais le projet de loi des Finances de l’exercice 2020, et celui de la reddition des comptes de l’exercice 2018 ne sont pas encore transmis au Parlement. C’est-à-dire que la République a déjà consommé le retard de plus de la moitié du délai constitutionnel accordé à l’Assemblée nationale pour examiner le projet de budget 2020.
Le budget 2019 également déposé en retard
Le même retard déploré a été également observé pour le dépôt du projet de loi de Finances de l’exercice 2019. En effet, Bruno Tshibala, Premier ministre de l’époque, avait déposé simultanément à l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances exercice 2019 (évalué à 10.352.3 milliards de Fc, soit 5,923 milliards de dollars américains (Usd) et le projet de loi portant reddition des comptes exercice 2017, le mercredi 03 octobre 2018, soit 18 jours de retard par rapport au délai constitutionnel.
Et c’est le mardi 23 octobre 2018 que les députés nationaux avaient débuté l’examen de ce projet de budget 2019, après avoir été présenté et défendu par le Premier ministre honoraire Bruno Tshibala. Ce texte a été déclaré recevable le jeudi 25 octobre 2018 puis directement confié à la commission ECOFIN (Economique, financière et de contrôle budgétaire) de l’Assemblée nationale, pour un examen approfondi.
Les conclusions du rapport de cette commission ont été approuvées par l’assemblée plénière le vendredi 02 novembre 2018. C’est donc ce même vendredi 02 novembre 2018 que ce budget 2019 a été adopté à l’Assemblée nationale, au lieu du 25 octobre comme l’exige la loi.
A l’occasion, rappelle-t-on, les députés nationaux avaient également adopté la loi sur la reddition des comptes de l’exercice 2017, ainsi que deux autres nouvelles lois portant création, organisation et fonctionnement d’abord de l’Ordre national des architectes, puis de l’Ordre national des ingénieurs en Rd Congo. Transmis au Sénat pour une seconde lecture, la loi des Finances 2019 a été adoptée à la Chambre haute du Parlement le vendredi 16 novembre 2018, avant d’être envoyée au Président de la République pour promulgation.
Il sied de faire remarquer que, dans le but de se conformer à l’article 83 de la Loi des finances, les parlementaires ont examiné précipitamment ce texte. Ce qui fait qu’il a été même adopté en des termes identiques par les deux Chambres du Parlement au cours de cette session de septembre 2018.
L’expérience du budget 2018 devrait servir d’exemple
L’on se souviendra qu’au cours de la session ordinaire de septembre 2017, le retard pris par le gouvernement dans la transmission au Parlement du projet de loi de finances de l’exercice 2018 (évalué à l’équivalence de plus de 5 milliards de dollars américains) avait valu l’interpellation du Premier ministre de l’époque, M. Bruno Tshibala, devant la représentation nationale, le mercredi 06 décembre 2017. Signalons que ce projet de loi a été déposé le mercredi 15 novembre 2017 à l’Assemblée nationale, soit tout 1 mois entier ou trente jours de retard du délai constitutionnel.
Répondant à cette interpellation, l’ex-Premier ministre Bruno Tshibala avait justifié en son temps ce retard par trois exigences auxquelles le Gouvernement de la République devrait prendre en compte à l’époque dans l’élaboration de ce budget 2018. Premièrement, le chevauchement des calendriers budgétaires des exercices 2017 et 2018.
Deuxièmement, la nécessité d’évacuer l’impact des mesures économiques urgentes destinées entre autres, à améliorer le niveau de collecte des recettes et arrêter la dépréciation de la monnaie nationale et juguler l’inflation. Et en dernier lieu, l’impératif d’intégrer dans le projet de budget 2018, des prévisions de la CENI dans le cadre du calendrier électoral en vue des prochaines élections présidentielle, législatives nationales et provinciales prévues en décembre 2018.
Malgré ces réponses, les députés n’étaient pas convaincus. Non satisfait des réponses données par l’ancien chef du Gouvernement Tshibala, l’initiateur de l’interpellation, le député national Henri-Thomas Lokondo de la majorité modérée, est allé plus loin dans sa conclusion pour exiger la démis