Un peuple qui oublie son passé est condamné à le revivre, dit-on! Les leçons de l’histoire doivent être réapprises de sorte qu’elles soient en permanence dans la mémoire collective. Tel semble ne pas être le cas en République Démocratique du Congo où les hommes politiques et religieux tiennent au nom des intérêts égoïstes des propos séparatistes, propres aux années sombres de ce pays.
Les derniers propos séparatistes en date sont ceux tenus le 16 janvier 2021 au Katanga par l’ex-patron de la commission électorale indépendante et pasteur, Daniel Ngoyi Mulunda. C’était à l’occasion de la commémoration du 20 -ème anniversaire de l’assassinat de l’ancien président congolais, Mzee Laurent Désiré Kabila. Cette commémoration bien qu’un évènement malheureux, est devenue une opportunité pour renforcer la cohésion nationale autour du serment de Mzee de ne jamais trahir le Congo. Au grand dam de l’opinion nationale, le Pasteur Ngoyi Mulunda n’a pas vu les choses de cet œil. Plutôt que de prêcher l’unité des Congolais et l’amour de leur patrie, M. Mulunda a préféré semer le désamour et la division. Visiblement, il avait mis de côté sa casquette d’homme de Dieu pour arborer celle d’un sécessionniste katangais. C’était plus un discours militant qu’une prédication dont le but était de diviser les Congolais et de stigmatiser les kasaïens vivant au Katanga- qui selon lui violent les coutumes des autochtones.
« Soyez humbles, vous n’êtes pas chez vous. Je vais du haut de cette chair, devant notre Dieu, vous dire des choses qui nous fâchent, nous Katangais et qui vont nous pousser à couper que vous le vouliez ou pas. S’ils ne veulent pas que le Katanga se coupe, ils doivent respecter nos dirigeants, particulièrement le sénateur à vie Joseph Kabila… Dieu a donné à chacun sa terre. Le Nord-Kivu aux Kivutiens, Kinshasa aux Kinois, le Katanga aux Katangais », a déclaré entre autres, Ngoyi Mulunda au cours de sa prêche. De tels propos sont d’une extrême gravité compte tenu de ce qui s’était passé dans ce coin de la République au début des années 90. Les autorités congolaises doivent prendre ces menaces au sérieux pour éviter que l’histoire ne se répète. Les kasaïens ne doivent pas servir de boucs émissaires à chaque fois que l’élite katangaise n’est pas d’accord avec Kinshasa. Certes, Ngoyi Mulunda écope d’une peine de prison de 3 ans après un procès quasi-irrégulier, mais cette peine est loin d’être dissuasive.
En effet, les kasaïens étaient victimes d’une épuration ethnique dans plusieurs villes du Katanga après les propos xénophobes des autorités d’alors dont Gabriel Kyungu Wa Kumwanza. Plus ou moins cent milles kasaïens sont tombés à coups de machette entre 1992 et 1993 à Lubumbashi, Kipushi, Kolwezi, Likasi, Kambove, etc. Les rescapés avaient quant à eux perdu maisons et commerces avant d’affluer vers les gares transformées en camps de concentration pour y attendre des trains irréguliers vers le Kasaï. Le voyage durait au moins trente jours pour une distance de mille kilomètres en raison des stops intempestifs. Ceux-ci étaient causés soit par des accouchements, soit par des morts qu’il fallait enterrer le long du trajet. Il y a aussi eu des victimes pendant et après le voyage. Celles-ci entrent dans le registre des dégâts collatéraux dont la justice congolaise devrait absolument tenir compte. Tout le monde sait combien la promiscuité au point de chute avait facilité la propagation de la tuberculose et de tant d’autres maladies gastro-intestinales. Nombreux en sont malheureusement morts bien qu’arrivés à destination.
Le Congo sous Félix Tshisekedi se dit un Congo de la rupture, un Etat de droit. Dans un Etat de droit, il est naturel que les droits de l’homme fassent partie des priorités. Les victimes du génocide des kasaïens, les survivants et les orphelins attendent toujours que justice leur soit rendue. Les crimes de Gabriel Kyungu et Jean Nguz sont des crimes imprescriptibles par leur nature. Ces massacres ciblés des kasaïens étaient consécutifs au discours d’incitation à la haine tribale prononcé par ces deux leaders katangais en Aout 1992. A ce propos, le Parquet Général ne dira pas qu’il n’a jamais été saisi. Une plainte y était déposée le 15 août 2016 contre M. Kyungu Wa Kumwanza et ses complices par le Ministre des Actions humanitaires, Steve Mbikayi. Triste est de constater qu’au nom des intérêts politiques, ni M. Mbikayi ni le parti au pouvoir ne réclament la justice pour les victimes de la xénophobie de M. Kyungu qu’ils appellent affectueusement ‘’Baba Kyungu’’ depuis peu. Les victimes de cette barbarie katangaise doivent se retourner dans leurs tombes. Nul n’ignore que c’est à cause du combat de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) contre le régime dictatorial du Maréchal Mobutu que le génocide contre les kasaïens avait eu lieu. Mobutu voulait dissuader les Occidentaux qui étaient pour le multipartisme. A cette fin, il avait réussi à instrumentaliser les leaders katangais contre les kasaiens, frères du Premier ministre d’alors et président de l’UDPS, Etienne Tshisekedi.
Près de 30 ans après l’épuration ethnique des kasaïens, il est temps que la justice congolaise se penche sur ce dossier. Tous les responsables de ces crimes doivent répondre de leurs actes, afin de mieux dissuader d’autres séparatistes tel que Ngoyi Mulunda. Pour ce faire, il est impérieux qu’un tribunal spécial soit créé pour juger les coupables de ce crime contre l’humanité dont étaient victimes les kasaïens au Katanga. Gabriel Kyungu et certains de ses complices doivent répondre de leurs actes pendant qu’ils sont encore vivants et lucides. Il sied de rappeler que M. Kyungu avait récidivé ses propos séparatistes et xénophobes en décembre 2011 lorsqu’ils décourageait les kasaïens du Katanga à battre campagne pour le candidat Etienne Tshisekedi. Ce n’est pas le nomadisme politique qui peut changer un tel homme.
L’Engagement pour un Congo Nouveau exhorte le Procureur général de la République à se saisir de la plainte qui a été déposée contre Monsieur Kyungu Wa Kumwanza et tous les autres responsables des massacres des kasaïens. Les preuves existent et ce ne sont pas les témoins qui manquent. Il est inacceptable que l’on continue à fermer les yeux sur un crime contre l’humanité. Ni la quête de légitimité ni une majorité parlementaire aux allures d’une auberge espagnole ne peuvent l’expliquer. Condamner Ngoyi Mulunda à trois ans de prison est loin d’être dissuasif. Il reste à savoir s’il va purger sa peine. En République Démocratique du Congo nombreux font la prison, mais très peu y purgent leur peine tant qu’ils ont toujours une place à la table du festin.