La République a rendu ses derniers hommages à feu le juge Raphaël Yanyi Ovungu, récemment nommé sur Ordonnance présidentielle comme Premier Président de la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe et décoré à titre posthume dans l’ordre national Héros nationaux Kabila-Lumumba au grade de « Grand chevalier ». Les obsèques ont eu lieu lundi 20 juillet 2020 au Palais de Justice, en présence du Chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo qui s’est incliné devant la dépouille mortelle de ce célèbre juge décédé dans la nuit du 26 au 27 mai à Kinshasa, alors qu’il présidait le procès dit de « 100 jours ».
Tout a commencé par une audience solennelle organisée par la Cour d’Appel de Kinshasa-Gombe, à travers laquelle le juge a été détaché de son serment. Avant l’arrivée du chef de l’Etat, l’on a assisté à une série d’allocutions, notamment du Barreau de la Gombe, du Ministère public, l’oraison funèbre des orphelins, et enfin le président de l’audience. Plusieurs personnalités politiques ont pris part à cette cérémonie.
« Un bon soleil ne dure jamais longtemps »
Au cours de l’oraison funèbre prononcée par le fils aîné du défunt juge, la famille se remet au Chef de l’Etat Félix Tshisekedi pour un aboutissement heureux de l’enquête diligentée pour élucider les circonstances de la mort de Raphaël Yanyi.
Les mots ont été forts, remplis de tristesse et de compassion, lus par un orphelin confiant à l’Etat de Droit dont les bases solides semblent être posées : « Cher Papa, si nous tes enfants, nous sommes devant cette ultime minute, au moment où ton corps va se rendre au cimetière, c’est pour rendre grâce au Seigneur, auteur de tout bien ; et pour te dire merci. C’est un privilège extraordinaire d’avoir eu ici-bas, un père comme toi ; humble, courageux, sage dont nous pouvons tous être fiers aujourd’hui. Malgré notre enfance et notre jeunesse à ce point bouleversé et blessé par ton décès inopiné, nous nous souviendrons toujours de toi, de ce trésor d’intelligence, de sagacité, de bonté, d’amour et d’amitié que tu as été et que tu laisses comme héritage à la postérité ».
Revenant sur les circonstances de la mort de son cher père, ce fils aîné de Raphaël Yanyi parle d’un séisme qui ne laisse personne indifférente : « Cher Papa, mardi 26 mai 2020, après avoir été au travail comme à ton habitude, tu ne présentais aucun signe d’un malaise. Aux petites heures de mercredi 27 mai 2020, nous apprenons d’une manière foudroyante, que tu as rendu l’âme pendant ton transfert au centre médical Nganda à Kintambo, où ton décès est constaté quelques instants après ton admission (…). C’est un véritable séisme qui ne laisse personne indifférente, un coup de tonnerre qui s’est abattu sur tes enfants poignardés au cœur. Ce coup dur pour nous ».
Toujours dans cette oraison funèbre, l’orphelin Yanyi rappelle le sacrifice consentis par son défunt pour la consolidation d’un Etat de droit en RDC : « Cher Papa, tu rends l’âme debout, l’arme à la main, en pleine activité, au moment où tu officies comme un grand juge-président dans un procès de tous les enjeux et de tous les dangers. Un procès sans précédent dans l’histoire de la RD Congo, notre pays. Tu voulais que notre pays change ; que l’Etat de Droit s’y enracine durablement ; tu luttais contre les forces obscures qui maintiennent ce pays en otage. Tu te battais contre un ennemi invisible profondément enraciné dans ce pays de Lumumba, la mafia. Tu n’as cédé ni aux menaces, ni aux intimidations. Au contraire, tu as résisté jusqu’au bout, aux pots de vin et à la corruption, même déguisée aux trafics d’influence, à la malversation, aux promesses juteuses d’argent… En le faisant, cher papa, tu laisses à la nation congolaise l’idée d’un juge intègre, rigoureux, compétent et convaincu de sa mission. Juge sagace et bien éclairé ; tu meurs aujourd’hui Martyrs de la démocratie et d’un Etat de Droit qui la caractérise. Tu entres désormais dans le panthéon des héros, des hommes illustres, des magistrats célèbres… Cher Papa, avec ton décès, notre pays vient de perdre un intellectuel de renom, un magistrat au sens élevé d’abnégation, qui a su donner le meilleur de lui-même à la nation ».
Ainsi pour clore son discours, il se remet à la Justice et croit en la traque des assassins de son feu père : « Nous le savons aujourd’hui, tous les rapports indiquent que ta mort n’est pas naturelle. Nous restons convaincus que la République ne laissera pas ce crime impuni. Les auteurs de ce crime seront connus et ils paieront un jour. Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris. Que son nom soit loué. Un Bon soleil ne dure jamais longtemps ».
Parmi les personnalités présentes à la cérémonie d’adieux au juge Yanyi, figure le député national Lambert Mende Omalanga. Cet ancien porte-parole du Gouvernement de la République et notable de la province du Sankuru espère que la justice donnera les vraies conditions de la mort de celui qui avait entamé le procès 100 jours.
« Nous remercions le Président de l'avoir honoré à sa juste valeur et nous, nous espérons que la République poursuivra cette enquête pour déterminer correctement les conditions dans lesquelles il est décidé. Je n'ai pas grand-chose à ajouter puisque l'émotion submerge tous », a déclaré Lambert Mende Omalanga.
Soulignons que la dépouille de Raphaël Yanyi Ovungu repose désormais à la Nécropole entre Terre et Ciel de la N’sele.